Cher public,
Veuillez trouver ici le programme détaillé des concerts des Carmina Burana organisés en collaboration avec le Poulpe Festival. Nos concerts présentent ces célèbres poèmes médiévaux sous deux formes: Dans l’église paroissiale, deux grands concerts sont consacrés à la cantate pour solistes, chœurs d’enfants, chœur mixte, pianos et percussions de Carl Orff. Sur les scènes du Festival, un ensemble de musiciens proposent des extraits des originaux médiévaux du Codex Buranus de Benediktbeuren.
Présentation de la Cantate de Carl Orff
Carmina Burana, c’est le titre donné par le bibliothécaire de la cour de Munich aux deux cents chants rassemblés dans un manuscrit du XIIIème siècle découvert, en 1803, au couvent de Benediktbeuren, dans le Tyrol. Ces textes en bas latin, en moyen haut allemand et en vieux français, ainsi qu’un certain nombre de strophes réunissant ces différentes langues, célèbrent avec verdeur et sensualité́ le plaisir de manger, de boire, de jouer et d’aimer.
Carl Orff fut enthousiasmé par la lecture de ces poèmes dont « le rythme entraînant et le caractère imagé de ces poèmes, et tout autant la musicalité riche en voyelles et la concision unique de la langue latine » lui inspire une musique qui rencontrera, dès sa création en 1937, un grand succès.
Les vingt‐quatre chants de la cantate encadrés par une invocation à Fortuna, déesse de la destinée et de la chance, sont organisés en trois grands complexes thématiques : le printemps, la taverne et l’amour, qui sont les thèmes favoris des goliards et des vagants, clercs restés laïcs et qui, ayant partagé les bancs des facultés avec les prêtres, connaissent parfaitement la littérature latine en vogue aux XIème et XIIème siècles.
La gaieté́ bucolique du printemps est évoquée dans l’unisson d’une litanie, avant l’appel joyeux de l’amour lancé par des cloches carillonnantes. La danse orchestrale Uf dem Anger renoue avec un ancien usage populaire de Bavière, avant la plainte des jeunes filles en moyen‐haut allemand mâtiné́ de bas latin, Floret silva nobilis. Leur coquetterie dans Chramer, gip die Varwe mir ne suscite chez les hommes qu’elles veulent aguicher par un savant maquillage que des commentaires narquois. Leur dialogue cède ensuite la place à l’invocation bachique à la reine d’Angleterre, sans doute Aliénor d’Aquitaine, épouse du roi Henri II Plantagenet, et initiatrice d’une des cours les plus célèbres de l’époque courtoise.
L’esprit théâtral de la deuxième partie de l’œuvre, intitulée In Taberna, à la taverne, est incontestable : elle débute par une confession satirique et, avec un plaisir effréné́, professe la pravitas, la dépravation. La voix de fausset du cygne qui rôtit dans la poêle offre une parodie du ténor buffo ; puis, dans un discours d’ivrogne, le saint patron du jeu de dés se présente, et se proclame abbé́ du pays de Cocagne ; cette scène de ripailles culmine dans un chœur d’hommes entraînant, qui célèbre le plaisir de boire dans une exubérance orgiaque.
Dans la troisième partie, la Cour d’amours, alternent et se mélangent l’innocence feinte et le raffinement, la plainte amoureuse et la quête de l’amour, tandis que Si puer cum puellula, poème érotique et cru, chanté a capella par les hommes, précède In trutina, le tendre aveu amoureux de la dame à son chevalier. L’hymne à Hélène et à Vénus se termine sur la reprise du vigoureux chœur initial, construit sur un ostinato. Cette répétition symbolise la roue du destin qui tourne sur elle-même ; Orff l’avait découverte sous forme de miniature dans le recueil des Carmina Burana.
D’après un article d’Uwe Kraemer traduit par Odile Demange
Carmina Burana, Carl Orff (1895-1982)
Léonie Renaud (soprano), Alexandre Beuchat (baryton), Thierry Dagon (haute-contre)
Chœur de Chambre de l’Université de Fribourg avec des élèves du Gymnase GYB (direction Sidonie Repond)
Chœur Chanteclair et Chœur d’enfants Les Ménestrels (direction Anaëlle Désert)
Philippe Morard, Florent Lattuga, pianos
Louis-Alexandre Overney, timbales
Charles de Ceuninck, Jacques Hostettler, Yves Kolly, Annick Richard, Nicolas Sutter, percussions
Pascal Mayer, direction
Carmina Burana : Cantiones profanæ, cantoribus et choris cantandæ, comitantibus instrumentis atque imaginibus magicis |
Poèmes chantés de Beuern : Chants profanes, pour chanteurs solistes et chœurs, avec accompagnement instrumental et images magiques. |
Carl Orff, (1935-1936), 1937, cantate scénique, première partie des Trionfi |
La roue de la Fortune avec les inscriptions « Je règnerai », « Je règne », « Je régnais », « Je suis sans royaume »
Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 1r
FORTUNA IMPERATRIX MUNDI
1. O FORTUNA
Chœur
CB 17: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 1r
O Fortuna velut Luna statu variabilis, semper crescis aut decrescis. Vita detestabilis nunc obdurat et tunc curat ludo mentis aciem, egestatem potestatem dissolvit ut glaciem. |
O Fortune comme la Lune à l’état variable, toujours tu croîs ou décrois. La vie détestable d’abord insensibilise et ensuite veille par jeu sur l’acuité de l’esprit, la pauvreté le pouvoir elle les dissout comme glace. |
Sors immanis et inanis, rota tu volubilis, status malus vana salus, semper dissolubilis obumbrata et velata michi quoque niteris. Nunc per ludum dorsum nudum fero tui sceleris. |
Sort monstrueux et vain, tu [es] la roue qui tourne, état mauvais vain salut, toujours divisée ombrageuse et voilée tu me contrains aussi. Maintenant par jeu mon dos nu je présente à ta scélératesse. |
Sors salutis et virtutis michi non contraria, est affectus et defectus semper in angaria. Hac in hora sine mora corde pulsum tangite quod per sortem sternit fortem mecum omnes plangite. |
Le hasard du salut et de la vertu ne m’est pas contraire, il est affecté et épuisé toujours en corvée. À cette heure sans retard touchez la corde vibrante qui par le sort terrasse le courageux avec moi tous pleurez. |
2. FORTUNE PLANGO VULNERA
Chœur
CB 16: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 48v
Ornements végétaux, Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 64
I. PRIMO VERE
3. VERIS LETA FACIES
Petit chœur
CB 138: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 57r
4. OMNIA SOL TEMPERAT
Baryton
CB 136: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 56v
5. ECCE GRATUM
Chœur
CB 143: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 59r
Dessin en marge du poème CB 92 Anni parte florida, Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 39
UF DEM ANGER TANZ
6. TANZ
Danse instrumentale
7. FLORET SILVA NOBILIS
Chœur
CB 149: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 60v
8. CHRAMER, GIP DIE VARWE MIR
Chœur
CB suppl. 16 (passim): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 107v
paroles de Marie-Madeleine dans un jeu para-liturgique
9a. REIE
Ronde instrumentale
9b. SWAZ HIE GAT UMBE
Chœur
CB 167a: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 67v
9c. CHUME, CHUM, GESELLE MIN!
Petit chœur
CB 174a: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 69v
9d. SWAZ HIE GAT UMBE
Chœur
(reprise: voir ci-dessus)
10. WERE DIU WERLT ALLE MIN
Chœur
CB 145a: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 60r
Tout le monde boit, Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 89
II. IN TABERNA
11. ESTUANS INTERIUS
Baryton
CB 191 (passim): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 84r
12. OLIM LACUS COLUERAM
Ténor et chœur d’hommes
CB 130: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 53v
13. EGO SUM ABBAS
Baryton et chœur d’hommes
CB 222: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 97v
14. IN TABERNA QUANDO SUMUS
Chœur d’hommes
CB 196: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 87v
Couple au bouquet, image horizontale parmi les poèmes consacrés à Flore, Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 72
III. COUR D’AMOURS
15. AMOR VOLAT UNDIQUE
Soprano et chœur d’enfants
CB 87 strophe 4: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 37r
16. DIES, NOX ET OMNIA
Baryton
CB 118 strophes 5+6+2: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 50r
17. STETTIT PUELLA
Soprano
CB 177 strophes 1+2: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 70r
18. CIRCA MEA PECTORA
Baryton et chœur
CB 180 strophes 5-7: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 71r
19. SI PUER CUM PUELLULA
Baryton et chœur d’hommes
CB 183: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 71v
20. VENI, VENI, VENIAS
Double chœur
CB 174: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 69r
21. IN TRUTINA
Soprano
CB 70 (passim): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 28r
22. TEMPUS EST JOCUNDUM
Soprano, baryton, chœur d’enfants
CB 179 strophes 1+4+7+5: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 70v
23. DULCISSIME
Soprano
CB 70 (fin): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 28r
Ornements végétaux, Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 64
BLANZIFLOR ET HELENA
24. AVE FORMOSISSIMA
Chœur
CB 77 (strophe 8): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 32r
25. O FORTUNA
Chœur (reprise du premier numéro)
CB 17 (passim): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 1r
Carmina Burana, version « historiquement informée »
Le manuscrit conservé jusqu’au XIXe siècle dans la bibliothèque de l’Abbaye bénédictine de Benediktbeuren, actuellement déposé à la Bayerische Staatsbibliothek de Munich sous la cote Clm 4660, a probablement été mis en forme entre 1230 et le XIVe siècle. Il s’agit d’une très importante collection de textes poétiques, satiriques, chansons liturgiques, chansons à boire, chansons d’amour dont certains comportent des indications destinées à rappeler la mélodie sur laquelle ils étaient chantés. Les quelque 250 pièces du manuscrit sont anonymes. Mais certaines se retrouvent dans d’autres sources contemporaines ou antérieures. Les chercheurs ont pu ainsi en déterminer la paternité et, dans certains cas, reconstitué les mélodies, voire même les polyphonies qui accompagnaient ces textes.
C’est sur la base de ces recherches que l’ensemble La Rivera, mandaté par l’Association des Concerts de Payerne, peut présenter aujourd’hui des reconstitutions « à la mode médiévale » de ces textes dont la truculence, l’impertinance même à l’égard de la hiérarchie officielle des clers, mais aussi la tendresse et l’humour consonnent encore avec le monde d’aujourd’hui.
Ensemble La Rivera:
- Emilie Mory, vièle à archet, chant, chalémie, percussions
- Julia Zimina, guiterne,
- Josquin Piguet, trompette à coulisse, corne, chant, flûtes, percussions
- Ian Harrison, chalémie, bombarde, cornemuse, flûtes, percussions
- Yves Dennier, vièle à roue
- Benoît Zimmermann, organetto
Les poèmes choisis pour les mini-concerts du Poulpe Festival reflètent différentes facettes du Codex buranus, depuis les textes quasi-liturgiques (Bonum est confidere, Crucifigat) jusqu’aux histoires glauques (Ich was ein chin so wolgetan) en passant par les chansons à boire et à manger (In taberna, Alte clamat, Bache bene venies). L’ordre des pièces ainsi que le choix des strophes pourront varier en fonction du public, du lieu et de l’heure…
TEMPUS TRANSIT GELIDUM
CB 153: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 61v
PROCURANS ODIUM
CB 12 (strophe 1): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 47v
BONUM EST CONFIDERE
CB 27: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 3r
ICH WAS EIN CHINT SO WOLGETAN
CB 185 (strophes 1, 2, 6, 9, 10): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 72r
CRUCIFIGAT OMNES
CB 47 (strophe 1): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 13r
ECCE TORPET PROBITAS
CB 3: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 43r
TEMPUS EST JOCUNDUM
CB 179 strophes 1+2+7+8: Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 70v
FAS ET NEFAS
CB 19 (strophe 1): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 1
IN TABERNA QUANDO SUMUS
CB 196 (strophes 1-6): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 87v
ALTE CLAMAT EPICURUS
CB 211 (strophe 1,2,5 et canon instrumental): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 92r
BACCHE BENE
CB 200 (strophe 1): Codex buranus – BSB Clm 4660 fol 89r